Nouveau rapport du CLEMI : faire de l’éducation aux médias un objectif transversal
En juin 2021, le Centre pour l’éducation aux médias et à l’information remettait le rapport Renforcer l’éducation aux médias et à l’information et la citoyenneté numérique au ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports. Rédigé par le groupe d’experts ÉMI « Renforcer l’ÉMI et la citoyenneté numérique », le rapport revient sur la place de ces thématiques au sein de l’éducation nationale.
Un contexte qui renforce l’importance de l’ÉMI et la citoyenneté numérique
Dans l’introduction du rapport, le CLEMI rappelle le contexte particulier dans lequel il s’inscrit. Il précise que « la question de la production et de l’accès à une information fiable se pose de manière beaucoup plus cruciale qu’auparavant, en raison de la création massive de flux informationnels et de leur diffusion instantanée à l’échelle planétaire, sans régulation suffisante et souvent sans cohérence avec les droits des États. » Et ajoute que « Dans ce cadre inédit, il convient de prévenir les usages détournés, voire illégaux, des opportunités offertes par le média numérique en matière d’information. L’École porte une responsabilité dans la mise en œuvre de cette prévention. » Il s’agit de donner aux élèves la capacité de discerner les usages responsables du numérique, de faire usage d’un esprit critique à bon escient, de comprendre et d’interpréter les flux informationnels qui strient la société contemporaine, de distinguer connaissances et croyances, informations, fausses informations et théories du complot.
Une transversalité du sujet insuffisamment mise en œuvre
La présence du numérique dans tous les champs de la société et son utilisation par les jeunes exige de l’éducation nationale une intégration urgente de l’ÉMI dans ses programmes. Pourtant, si l’ÉMI figure dans les programmes comme un domaine de compétences transversales, cette composante du parcours citoyen « souffre d’un manque d’appropriation par l’ensemble des acteurs de la chaîne éducative : corps d’inspection, personnels de direction, professeurs de tous les degrés et champs disciplinaires, équipes éducatives ». Le rapport relève que la mobilisation des équipes dans cette éducation reste hétérogène, souvent dépendante de l’engagement individuel de professeurs ou de CPE plus que le fruit d’un travail collectif l’inscrivant dans un parcours d’éducation. En outre, le CLEMI pose le constat qu’à l’école, au collège et au lycée, l’ÉMI est déployée avec de fortes disparités d’un territoire à l’autre : ce constat est à mettre en lien avec celui d’un parcours citoyen trop rarement formalisé, cohérent et évalué. Pour le premier degré, l’absence de référents académiques, à l’exception de l’académie de Paris, est sans doute un élément explicatif de cette situation.
La formation du personnel et le développement des ressources, leviers pour renforcer la place de l’ÉMI
L’enjeu porte sur une meilleure appropriation de l’ÉMI par l’ensemble des acteurs éducatifs, dans une perspective de renforcement de la formation aux valeurs républicaines des enseignants et des acteurs de la communauté éducative.
Dans un premier temps, le CLEMI propose d’inscrire l’ÉMI comme une composante des actions relatives aux valeurs de la République. Il s’agit ensuite de renforcer et de structurer la place de l’ÉMI dans la formation initiale, continuée et continue des personnels enseignants et d’éducation du premier et du second degré. Il faut enfin renforcer la formation de formateurs et la formation des personnels de direction et d’inspection pour une meilleure appropriation collective de l’ÉMI.
Le CLEMI rappelle par ailleurs que l’enjeu des ressources pour l’ÉMI n’est pas tant celui d’un manque que d’une profusion des productions existantes émanant d’horizons multiples : institutions, — Réseau Canopé, CLEMI, Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), Commission nationale informatique et libertés (CNIL), Défenseur des droits, etc. — associations, médias, agences de production, entreprises, — notamment de l’économie sociale et solidaire, start-up de la filière EdTech — ou encore agences de communication. Il s’agit dès lors de faire du site du CLEMI le premier portail d’accès aux ressources en ÉMI regroupant l’ensemble des ressources proposées par les opérateurs publics, par les médias et les autres partenaires. De même, le CLEMI propose de soutenir la production de ressources pédagogiques pour répondre au plus près des attentes et besoins des enseignants et des élèves en s’inspirant de la démarche MediaLab du CLEMI. Il suggère par ailleurs d’éditer un guide pratique Éduquer aux médias et à l’information à l’École fondé sur les apports de la recherche et des propositions didactiques et pédagogiques. Enfin, il soumet l’idée de la mise en place d’un « compte ressources enseignant » pour l’ÉMI qui permettrait de financer une partie de la filière des offres numériques payantes.
Il semble évident que les propositions ne manquent pas pour faire de l’ÉMI et de l’éducation à la citoyenneté une matière structurante et transversale des programmes de l’éducation nationale. Un manque du rapport — ou piste de travail pour l’avenir ? — peut néanmoins être souligné. En effet, les collectivités locales ne sont pas évoquées, alors qu’elles sont pleinement investies dans un travail étroit avec les établissements de leurs territoires et qu’elles développent également des solutions aux problématiques posées.