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Présidentielle 2017 : le numérique dans le PROGRAMME des candidats

Publié le 18 avril 2017

 

 

Les enjeux liés au numérique et aux services offerts aux citoyens ont vocation à être au cœur des débats publics. Alors que les services publics se dématérialisent, que les inégalités d’accès au réseau et aux services persistent, dans les échanges liés à l’élection présidentielle de 2017, la question numérique est quasiment absente.

 

Villes Internet a interpellé les candidats

Le 3 avril dernier, l’association Villes Internet a envoyé un courrier aux 11 candidats à l’élection présidentielle (relire l’article : http://www.villes-internet.net/articles/58e3b20ea1c4a706eb5229eb) afin qu’ils s’engagent une fois élu(e), à reconnaître Internet comme un droit humain fondamental, dans la lignée d’une résolution des Nations Unies. Plus de 70 élus locaux français, membres de notre association, avaient signé un appel pour réduire la fracture numérique en permettant à chacun d’avoir accès aux mêmes services. L’absence de réponse des candidats (seul Jacques Cheminade a répondu… en nous renvoyant à la consultation de son programme) n’est pas un signal positif sur la prise en compte de ces sujets.

Nous avons examiné en détail les programmes publiés des candidats et, quand il y en avait, les notes spécifiques liées au numérique. Surprise, pour certains candidats, le thème même est parfois absent ou à peine traité. C’est en particulier le cas chez Nathalie Arthaud, Philippe Poutou, ou Jean Lassalle et même de Marine Le Pen : le mot “internet” ne figure pas dans son programme, et le terme numérique n’est employé qu’à 3 reprises.  

Le plus souvent, au-delà de quelques objectifs, le “comment” est souvent éludé.

 

Internet, un droit fondamental ?

Sur la reconnaissance de l’accès à  Internet comme un droit humain fondamental, les candidats se positionnent de manière plus ou moins claire et explicite. Le #5 des “Livrets de la France insoumise” préparé par un groupe de travail qui oeuvre pour Jean-Luc Mélenchon, énonce : “L’accès à Internet est devenu si central dans nos vies et nos démarches qu’il doit être reconnu comme un droit fondamental”. Il va même plus loin en proposant “l’inscription du droit d’accès à Internet dans la Constitution à l’horizon notamment d’une 6e République”. Et si d’autres candidats reconnaissent le bien-fondé à cet accès, leur position est peut-être un peu moins précise : “L’accès à internet doit devenir un droit incontournable” déclare Benoît Hamon dans la catégorie “Territoires” de son programme, quand Emmanuel Macron constate simplement que  “(…) les Français n’ont pas tous le même accès à Internet”.

 

L’accès au réseau, sujet le plus évoqué

Quand on étudie d’un peu plus près les propositions globales sur le numérique, on note que certains sujets se recoupent. C’est le cas par exemple pour les zones blanches et le très haut débit. Accélérer l’achèvement de la couverture du pays en très haut débit d’ici 2022 est une proposition faite par la majorité des candidats.e. Pour François Fillon, la promesse est de “faire du Très Haut Débit la priorité d’infrastructure du quinquennat”. Pour cela la proposition faite est d’ “accélérer le déploiement du Très Haut Débit fixe et mobile d’ici à 2022 en refinançant le Plan France Très Haut Débit, en le réorganisant et en initiant un « Plan 5G »”.  

Le programme de Marine Le Pen indique vouloir “soutenir l’effort d’investissement en infrastructures, en particulier dans la ruralité (très haut débit, couverture téléphonique, routes…)”. Nicolas Dupont-Aignan quantifie l’effort à engager: « Étendre l’accès au très haut débit et la couverture des téléphones portables à toutes les zones rurales (coût estimé à 25 milliards d’euros), bourgs et petites villes en utilisant l’argent prévu pour de grands projets inutiles ». Jacques Cheminade dénonce la situation sans préciser ses propositions : “En France, plus de 300 communes restent des « zones blanches » ne disposant toujours pas de la téléphonie mobile la plus élémentaire (2G), et plus de 2200 communes n’ont pas accès à internet sur le téléphone portable (3G et 4G)”.

Si la plupart des candidats dressent un état des lieux ils ne sont que quelques-uns à  proposer un plan d’action détaillé pour éradiquer les zones blanches et déployer le très haut débit. Emmanuel Macron souhaite davantage mettre à contribution les opérateurs de téléphonie pour y parvenir : “Les opérateurs devront y apporter la 4G et améliorer la couverture en doublant le nombre d’antennes mobiles. L’Etat soutiendra cette initiative en consentant des conditions économiques favorables sur les redevances d’utilisation des fréquences hertziennes. S’ils ne tiennent pas leurs objectifs, les opérateurs pourront être sanctionnés financièrement.”. Dans son livret numérique, Benoît Hamon propose une aide aux villes : “Nous nous engagerons aux côtés des collectivités territoriales, pour le financement des pylônes nécessaires à la couverture mobile réelle du territoire à commencer par les centre-bourgs”. Jean-Luc Mélenchon souhaite mettre en place  “un plan d’investissement des infrastructures pour atteindre un objectif d’accès au Très haut débit sur tout le territoire sous 5 ans et une couverture totale 4G sous 10 ans”.

 

 

La médiation et la formation au numérique

L’accès au réseau ne résout pas tout. La fracture numérique est également une réalité devant laquelle les collectivités sont bien seules face à des citoyens parfois perdus devant la dématérialisation d’outils, de procédures ou de services. Sur l’accompagnement des citoyens dans le monde numérique, les candidats sont moins prolixes et le coût de ces initiatives n’est le plus souvent pas chiffré.

François Fillon propose une approche qui vise davantage à initier les jeunes populations  : “généraliser l’enseignement et la formation au numérique à tous les niveaux. Recruter des enseignants en informatique. Transformer le cours de technologie du collège (1h par semaine) en cours de « culture numérique (…). Accélérer le développement de la formation professionnelle au numérique. Emmanuel Macron implique davantage les collectivités dans le processus de médiation numérique : “Nous porterons une stratégie d’inclusion à destination de ceux qui rencontrent des difficultés à utiliser le numérique en développant avec les associations et les collectivités, un réseau d’accompagnement sur le territoire qui proposera du temps de soutien et des formations aux outils et aux services numériques”. Jean-Luc Mélenchon développe également peu la partie sur la manière de faire mais les suggestions sont plus variées : “Faire de la médiation numérique une priorité, notamment en direction des milieux sociaux défavorisés et des générations plus âgées. Chacun doit être capable de comprendre et de maîtriser les technologies numériques, leurs enjeux et leurs usages”. “Soutenir les associations de médiation numérique et revaloriser le statut des médiateurs. (…) Développer les répare-cafés, fablabs, projets collaboratifs, pour offrir des formations à l’usage et à la citoyenneté numérique”. Sur cet aspect, Benoît Hamon est un peu plus précis : “Chacun doit pouvoir accéder, en tout point du territoire, à un socle de compétences numériques et à une « culture numérique » émancipatrice. Pour atteindre les « décrocheurs du numérique », Benoît Hamon souhaite outiller les collectivités. Il proposera, au titre de l’article 69 de la Loi République Numérique, un schéma directeur de déploiement des équipements de médiation numérique, maillé a minima à l’échelon intercommunal”. Les propositions des candidats restent tout de même assez floue sur le sujet et les 7 autres n’évoquent pas ou à minima cette problématique.

 

 

Les services publics numériques

La dématérialisation croissante des services publics et la lutte contre l’exclusion qu’elle peut générer devraient être un enjeu fort pour les candidats mais là encore, tous les candidats ne traitent pas le sujet ou se limitent parfois à une approche un peu hémiplégique, centrée sur la mise en place de services.

Emmanuel Macron axe son programme  sur la poursuite de la dématérialisation “d’ici 2022, 100% des démarches administratives pourront être effectuées depuis Internet” et évoque la création d’ “un compte citoyen en ligne (site et application), qui rassemblera sur une même interface tous les droits, notamment ceux liés à la santé, à la trajectoire professionnelle, à la formation, à la situation fiscale, aux droits civiques”. Nicolas Dupont-Aignan veut “Poursuivre la numérisation de notre Etat” avec un”un fonds public pour l’automatisation des processus administratifs”.

Seuls Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon évoquent les risques d’exclusion  : pour accompagner les usagers devant le risque de non-recours à des droits obtenus via des procédures en ligne, Benoît Hamon propose la création

“d’un fond « 0% non-recours ».” Jean-Luc Mélenchon partage l’objectif du développement de la dématérialisation des services publics mais l’inscrit “dans une démarche de design pour tou·te·s, tout en maintenant les services physiques de proximité” et propose aussi d’ “accompagner les structures publiques, notamment locales, sur le Réferentiel général d’accessibilité pour les administrations”.

Plusieurs candidats développent également des propositions proches sur le développement de l’open data et la protection des données personnelles des citoyens. Mais, alors que les collectivités locales sont en première ligne, pour former leurs agents, développer les service, accompagner les utilisateurs, leur rôle est le plus souvent passé sous silence…

Des listes de propositions ne font pas une vision…

L’ambition numérique des candidats s’exprime le plus souvent sur les tuyaux ou les enjeux du numérique à l’échelle globale (accords internationaux, souveraineté numérique). On peut regretter que la plupart des candidats n’aient pas développé une vision forte pour une approche du numérique proche du citoyen. Un rendez-vous manqué ?

 

Le programme numérique des candidats (quand il y en a) : 
 

Emmanuel Macron : https://en-marche.fr/emmanuel-macron/le-programme/numerique
Jean-Luc Mélenchon : https://avenirencommun.fr/le-livret-numerique/
François Fillon : https://www.fillon2017.fr/projet/numerique/
Benoît Hamon : https://www.benoithamon2017.fr/wp-content/uploads/2017/04/hamon2017_numerique.pdf
Marine Le Pen : https://www.marine2017.fr/programme/
Nicolas Dupont-Aignan : http://www.nda-2017.fr/theme/equilibre-territoire-ruralite
Jacques Cheminade : http://www.cheminade2017.fr/-Projet-2017-
Jean Lasalle : http://jeanlassalle2017.fr/le-projet-de-jean-lassalle/
Philippe Poutou : https://poutou2017.org/sites/default/files/2017-03/ProgrammePOUTOU-2017_WEB_0.pdf
Nathalie Arthaud : http://www.nathalie-arthaud.info/culture-84539.html
François Asselineau : https://www.upr.fr/programme-elections-presidentielles-france

 

Par Valerio Motta